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Val-de-Marne. Syndrome du bébé secoué : la nourrice, Aurélie. S, jugée pour la mort de la petite Rose

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Marie et Renaud, un couple de Maisons-Alfort (Val-de-Marne), attendent le procès du décès de leur petite Rose, victime du syndrome du bébé secoué en juin 2018. La nourrice, accusée de violences ayant entraîné la mort, comparaît à partir de ce lundi 31 mai aux assises.


Première et unique enfant de Marie, 27 ans, infirmière coordinatrice, et Renaud, 29 ans, directeur adjoint d’un Carrefour Market, Rose aurait dû fêter ses six mois le 14 juin. Depuis mi-avril, ses parents la confiaient quelquefois à une nourrice de 35 ans « fortement recommandée par une de leurs amies » selon eux. Comme le confie auprès du Figaro Me Sylvie Vernassière, l’avocate des parents spécialisée en droit des dommages corporels, « ils avaient confiance en la nounou ».

Le mercredi 6 juin au matin, Rose est déposée chez sa nourrice qui gardait deux autres enfants, un autre bébé et son enfant de 4 ans. Les faits tournent au drame lorsque la nourrice appelle les secours alors qu’elle est en train de s’occuper de Rose. La petite est admise en urgence à l’hôpital Necker à Paris dans un état désespéré. Dans la nuit du 8 au 9 juin, les parents acceptent qu’elle soit débranchée entraînant le décès de la petite. L’enfant sera enterré le 19 juin en région parisienne. Selon l’avocate, « C’est une véritable tragédie. Marie et Renaud tiennent le coup en pensant tous les jours à leur fille, et en attendant la vérité sur les circonstances de sa mort ».

Le syndrome du bébé secoué rapidement envisagé par les médecins

La nourrice est placée en garde à vue le 19 juin, jour de l’enterrement de Rose. Dans sa première version, elle déclarait que l’enfant lui était tombé des bras alors qu’elle s’apprêtait à la coucher. Les médecins constatent cependant que l’enfant a été victime de secousses et songent immédiatement au syndrome du bébé secoué. Selon la Haute autorité de santé, il s’agit d’un syndrome qui consiste en un grave « traumatisme crânio-cérébral » provoqué par un « secouement, seul ou associé à un impact ».

Aux constats des médecins s’ajoutent les incohérences relevées rapidement par la police dans le récit de la nourrice qui finit par passer aux aveux. La nourrice voulait absolument que la petite Rose se taise, expliquant être exaspérée par ses pleurs ce qui l’a conduit à violenter la petite. La fillette n’est pas tombée mais a été jetée sur la table à langer, attrapée par les pieds la tête dans le vide, étouffée contre la nourrice qui lui a mis des tapes derrière la tête et l’a tirée par les cheveux. La trentenaire disposait d’un agrément de la Protection maternelle et infantile et avait pourtant reçu une formation sur le syndrome du bébé secoué.

Une fois l’information publicisée par les médias, cinq couples contactent l’avocate pour lui exprimer leurs inquiétudes. Tous ont également confié pendant plusieurs mois un de leurs enfants à la nourrice. Finalement, trois des cinq couples ont décidé de porter plainte pour « violences volontaires » dans l’objectif de se porter parties civiles aux côtés des parents de Rose. Les deux autres familles réfléchissent à faire de même. Un réconfort pour la mère de Rose : « Nous sommes contents que plusieurs familles soient à nos côtés, cela prouve que ce n’est pas seulement notre combat ».

Une détention provisoire pour la nourrice : une voie vers la reconnaissance du syndrome ?

Placée en détention provisoire, la nourrice est poursuivie pour « violence sans incapacité sur un mineur de 15 ans par une personne ayant autorité sur la victime » et « meurtre d’un mineur de 15 ans ». Elle encourt une peine de réclusion criminelle à perpétuité mais comme le déclare Me Vernassière « les plafonds sont rarement atteints ». En effet, en mars 2016, une assistante maternelle qui avait provoqué la mort d’un nourrisson de sept mois en 2008 a été condamnée à neuf ans de prison.

D’après la Haute autorité de santé, plusieurs centaines d’enfants sont victimes chaque année du syndrome du bébé secoué en France. Me Sylvie Vernassière le confirme également : « Plus de 200, selon l’extrapolation réalisée à partir des chiffres de Necker. 10% en meurent, et les trois quarts des survivants gardent des séquelles, parfois extrêmement graves ».

Le placement en détention de la nourrice de Rose est un acte symbolique permettant de relancer et d’ancrer concrètement les débats autour du syndrome du bébé secoué qui reste encore faiblement reconnu et sanctionné. Les parents ont décidé de se porter partie civile pour « éviter que d’autres parents vivent ce qu’ils sont en train de subir et tout mettre en œuvre pour que le syndrome du bébé secoué soit connu par le plus grand nombre » finit par conclure l’avocate.

En plus d’investir la voie judiciaire, le couple s’est tourné vers l’association Tatiana qui soutient les parents dont l’enfant a été victime du syndrome du bébé secoué. Les parents se rapprochent notamment des parents de Perrine, neuf mois, décédée en mai 2014 au Kremlin-Bicêtre. Ils s’impliquent dans l’association en collectant des fonds avec de la course à pied dans le but de sensibiliser le public à ce syndrome.

Un procès douloureux mais très attendu : « Ce procès, c’est pour Rose »

Après trois ans d’attente, débute ce lundi 31 mai trois jours de procès que les parents de la petite Rose attendent avec impatience. Ils espèrent que « justice sera rendue même si rien ne nous rendra notre Rose, notre bébé, notre fille, notre tout… ». Pour Marie, la mère de la fillette, cela va lui permettre de « faire le deuil de ce qui est arrivé » à son bébé même si elle reconnaît que « la plaie ne se refermera jamais ». Tandis que la mère souhaite une peine lourde pour Aurélie S., le père de l’enfant espère lui juste qu’elle sera condamnée.

Le couple veut avant tout comprendre ce qu’il s’est passé dans la tête de la nourrice le jour du drame et c’est d’ailleurs l’enjeu principal du procès durant lequel la cour examinera l’enfance de l’accusée. La nourrice aurait elle-même été victime de maltraitances et aurait été placée en foyer. D’après elle, ce métier lui permettrait de « réparer » les violences subies quand elle était enfant. Mais les parents restent prudents face à cela : « Son enfance maltraitée, ce n’est pas notre problème. Elle, un jour, elle sortira de prison et retrouvera son fils. Nous, on a perdu notre bébé pour toujours ». L’ancienne nourrice encourt trente ans de réclusion.

Par Emma Forton

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